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Francesco Rosi, maître d’un cinéma italien populaire et engagé – Le Monde

Le réalisateur italien Francesco Rosi avec sa fille Carolina au festival de Cannes, le 1à mai 1979.Francesco Rosi, cinéaste italien, auteur notamment de L’Affaire Mattei et de Main basse sur la ville, est mort dans son lit, samedi 10 janvier, à Rome, à l’âge de 92 ans. Avec lui disparaît un maître du cinéma italien, partisan d’un cinéma à la fois politiquement engagé et populaire. Partant, c’est un grand témoin de la richesse et de la diversité extrêmes de cette cinématographie – aujourd’hui hélas révolues – qui s’en va.

Il était né le 15 novembre 1922, à Naples. Une partie de sa jeunesse se déroule durant la seconde guerre mondiale, et sa vocation pour le cinéma – contrariée par son père – le mène à exercer divers talents : étudiant en droit, illustrateur de livres pour enfants, marionnettiste, animateur de radio, metteur en scène de théâtre. Il faut attendre la rencontre avec Luchino Visconti, dont il devient l’assistant sur La terre tremble (1948), chef-d’œuvre du néoréalisme, pour qu’il renoue avec son désir originel.

Entre l’assistanat à la réalisation et l’écriture de scénario, Francesco Rosi n’en tarde pas moins à s’affirmer comme réalisateur. En 1958, il signe son premier long-métrage, Le Défi, une histoire de « camorra » qui se déroule dans sa ville natale, Naples. Le film, qui mêle cinéma de genre et grand dossier socio-politique, pose les prémices de la manière de Rosi. Même s’il est loin d’être le seul à l’adopter (Luigi Zampa, Pietro Germi, Luigi Comencini se sont frottés au film noir sociologique), elle le distinguera de plus en plus dans le cinéma italien d’après-guerre, lequel conquiert son droit à la postérité par les voies royales du néoréalisme et de la comédie.

Inventeur du « film-dossier »

Rosi, quand bien même il lui arrive de s’aventurer sur d’autres terrains, restera durant toute sa carrière le grand inventeur et artisan du « film-dossier » italien. Ses fondements sont posés avec Salvatore Giuliano (1960). Le film s’ouvre sur la mort, en 1950, d’un bandit sicilien, et propose au spectateur d’en comprendre les soubassements économiques et politiques, notamment les collusions entre pouvoir politique et mafia, sur fond de revendication indépendantiste. Une succession fragmentaire de retours en arrière documentent l’histoire sicilienne de l’après-guerre et s’applique à en saper les mythes, à commencer par la légendaire figure du bandit d’honneur.

Cette manière de mêler le film d’enquête à la réalité historique sera la marque de fabrique de Rosi, et atteindra ses sommets dans Main basse sur la ville en 1963, puis L’Affaire Mattei en 1971. Le premier de ces films, qui remporte le Lion d’or de la Mostra de Venise, est centré autour de l’entrepreneur Nottola (interprété par l’acteur américain Rod Steiger), principal artisan de la vente de terrains agricoles par la municipalité de Naples à des spéculateurs immobiliers irresponsables. L’écroulement d’une maison et la mort de dizaines de personnes conduisent à la tenue d’une enquête destinée à faire le jour sur les responsabilités de cet accident. Rosi montre les pressions politiques et la corruption qui s’exercent sur la commission d’enquête avec une efficacité redoutable, rejoignant à sa manière bon nombre de ses confrères (de Pasolini à Antonioni, en passant par Bertolucci et Fellini) qui évoquent la face d’ombre du miracle économique italien, séparant le Nord et le Sud du pays en deux entités devenues comme étrangères l’une à l’autre.

Dans L’Affaire Mattei, dont le rôle-titre est interprété par l’intense Gian Maria Volontè, c’est la mort mystérieuse, aux commandes de son jet privé, en 1962, du patron de la pétrochimie italienne, véritable symbole du boom économique, qui lance le récit. Démocrate chrétien de gauche, homme d’ambition et franc-tireur, Enrique Mattei ne joue pas le jeu des instances économiques internationales. Il le paiera de sa vie. La manière dont Rosi se lance à la recherche des raisons, en vérité jamais élucidées, de la mort de son héros, lui vaut la Palme d’or au Festival de Cannes, partagée cette année-là avec l’explosif La classe ouvrière va au paradis de son compatriote Elio Petri, également interprété par Gian Maria Volontè.

Recherche d’une vérité impossible à atteindre

Rosi restera fidèle à cette veine engagée, à cette prospection inlassable de l’Histoire de son pays, à cette recherche infatigable d’une vérité le plus souvent impossible à atteindre. Les hommes contre (1970) est une dénonciation au vitriol de la conduite de l’état-major italien lors des combats de la première guerre mondiale. Cadavres exquis (1975), fruit de ces coproductions franco-italienne dont Rosi aura beaucoup profité, lance Lino Ventura, Marcel Bozuffi, Alain Cuny et Tina Aumont dans une exploration étouffante de la stratégie de la tension menée par l’Etat italien durant les années de plomb.

Le Christ s’est arrêté à Eboli (1979), adapté du roman homonyme et autobiographique de Carlo Levi paru en 1948, évoque la figure d’un médecin et peintre anti-fasciste, placé en résidence surveillée par le régime à la campagne. La fin de carrière du cinéaste est plus erratique, cédant à une certaine monumentalité culturelle. Ce sera la transposition à l’écran du Carmen de Bizet (1984), l’adaptation de Chronique d’une mort annoncée (1986), chef-d’œuvre du romancier colombien Gabriel Garcia Marquez, ou encore, ultime film du cinéaste, celle de La Trève (1997), d’après l’écrasant récit de retour des camps de Primo Levi, ultime film du cinéaste.

Rien qui n’efface, toutefois, la belle croyance du réalisateur en son art, telle qu’il l’énonça en 1995, à l’université de Padoue : « J’ai toujours cru en la fonction du cinéma en tant que dénonciateur et témoin de la réalité, et en tant que support d’histoires dans lesquelles les enfants puissent mieux connaître leurs pères et en tirer un enseignement afin de se former un jugement dont l’Histoire serait la référence. »

Source Article from http://www.lemonde.fr/cinema/article/2015/01/10/francesco-rosi-maitre-d-un-cinema-italien-populaire-et-engage_4553545_3476.html
Source : Gros plan – Google Actualités

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